Nous nous retrouvons désormais chaque semaine au conservatoire de Livry-Gargan. L’atelier a lieu dans la salle de danse, un nouvel espace à appréhender ensemble. Les enfants et l’équipe du CATTP y sont déjà venus plusieurs fois.
La salle est très belle, lumineuse, mais la circulation dans l’espace est très différente de celle des Ateliers Médicis. Il a fallu plusieurs séances pour trouver notre espace commun.
Lors des premières séances ici, les enfants étaient tellement excités qu’ils couraient partout, grimpaient sur les fenêtres, ouvraient les placards… Je ne savais pas trop comment capter leur attention, comment accueillir ces décharges d’énergie. Finalement, avec le soutien de Noémie, Patrick et Lucie, en laissant faire et en rebondissant toujours sur leurs propositions — courir, sauter, taper fort sur les surdos — nous avons réussi à revenir à la musique, au rythme, aux percussions.
Le piano est devenu un jeu prisé de tous. On tape, on frotte les cordes, on joue avec les poings, les coudes… Il a même trouvé sa place dans la trame du stage.
Les grands miroirs détournent souvent les enfants du groupe, du rythme, des percussions, des interactions. Ils prennent du temps pour se regarder, mais cela semble les rassurer.
Les ateliers sont aussi des moments de lâcher-prise, pour les petits comme pour les grands.
Je continue d’enregistrer les séances avec mon enregistreur numérique, qui est désormais un élément à part entière de l’atelier. Nous nous mettons autour, les enfants ont compris que c’était un micro et, tour à tour, nous parlons dedans. Jessie et Oudjou Ola en sont particulièrement fans : ils prennent toutes les postures des stars du hip-hop ou du rock’n’roll, c’est assez drôle. Jessie chante dans une langue inventée, avec beaucoup de lyrisme.
Le projet restait encore flou dans cette étape de création. Je ne savais pas du tout où j’allais.
Dans ma note d’intention initiale, je voulais « identifier les signatures rythmiques de chaque enfant et/ou du groupe et en développer avec eux une forme musicale ».
J’avais laissé cette étape volontairement ouverte, car je ne savais pas comment cela allait se passer.
Aujourd’hui, je sais que je veux faire des portraits sonores de chaque enfant, mettre en lumière leurs sensibilités et leurs singularités musicales. Cela fait plusieurs semaines que nous nous voyons, et je commence à connaître le caractère de chacun.
L’heure est au dérushage : huit heures d’enregistrements à écouter pour trouver les moments qui reflètent chacun d’eux, ou le groupe.
Je suis très excité à l’idée de me plonger dans cette quête, tout en doutant encore de ce que je vais pouvoir en faire. De plus, nous avons rendez-vous dans une quinzaine de jours avec la directrice du conservatoire et quelques professeurs. Il va falloir formuler une proposition claire pour envisager un partenariat…
J’aime travailler dans l’urgence, mais on ne s’y habitue jamais.
Affaire à suivre.